拳经捷要篇 / Le Classique du Poing (Quanjing) – Essai sur les clés de la victoire –

《纪效新书》(卷十八)

戚继光 (1562 年)

« Nouveau traité sur les disciplines efficaces » (en 18 chapitres)

Qi Jiguang (en 1562)

作者简介

戚继光(1528-1588),字元敬,号南塘,明代著名军事家、武术家。山东登州(今蓬莱)人,生于济宁,出生将门,自幼习武,后中武举。曾任参将、都指挥使、副总兵、总兵、太子太保、左都督、少报等职。著有《纪效新书》、《练兵实纪》、《止止堂集》等著作。

Brève introduction sur l’auteur

Qi Jiguang (1528-1588), Yuanjing de son prénom d’adulte 1, et surnommé 2 Nantang, était un célèbre stratège militaire et expert en arts martiaux pendant la dynastie Ming. Né à Jining dans la province du Shandong et résidant à Dengzhou (Penglai, de nos jours), issu d’une famille de généraux, il a pratiqué les arts martiaux depuis l’enfance, puis passa plus tard les examens militaires. Il servit en tant que général ; tout s’orientait vers une carrière de commandant, de chef adjoint des forces armées, puis de général, haut responsable auprès des Princes, gouverneur de l’Est, rédacteur et autres fonctions. Parmi ses écrits, il y a le « Nouveau traité sur les disciplines efficaces » 3, les « Registres pratiques sur l’instruction des troupes », la « Collection du hall Zhizhi », et autres écrits.  

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1 Le Zi en chinois, le prénom d’adulte ou encore le prénom de courtoisie, est une tradition selon laquelle le jeune adulte âgé de 19 ans se voit attribuer un nouveau prénom caractérisant son passage dans le monde adulte.

2 Le Hao en chinois, le surnom ou le pseudonyme, est un nom de plume choisi par un auteur pour signer ses propres productions intellectuelles.

3 Cette œuvre recouvre 18 chapitres sur la stratégie militaire (management des troupes en formation, stratégie des batailles au sol, batailles navales, etc.). Le chapitre 14 est consacré aux arts martiaux et aux exercices utiles à la préparation physique des soldats. C’est ce chapitre qui est traduit ici.

影响

《拳经捷要篇》在武术史上的地位非同一般,其后所附的懒扎衣、金鸡独立、探马等三十二势对后来武术的发展影响深远。后世的戚家拳、太极拳、洪洞通背拳等传统武术流派均受其直接影响。

Les influences

Dans l’histoire des arts martiaux, le « Classique du Poing – Essai sur les clés de la victoire  – » et ses 32 positions telles que le Paresseux noue ses vêtements, le Coq d’or se tient sur une patte, Caresser le cheval, etc., ont eu, plus tard, une profonde et large influence sur le développement des arts martiaux. Ce qui a donné la Boxe de la famille Qi (Qijiaquan), le Taijiquan, le Hongdong Tongbeiquan, et d’autres courants d’arts martiaux traditionnels, qui en ont été, également, directement impactés. 

 原文

( 此艺不甚预于兵,能有馀力,则亦武门所当习,但众之不能强者,亦听其所便耳。)

拳法似无预于大战之技,然活动手足,惯勤肢体,此为初学入艺之门也。故存于后,以备一家。

学拳要身法活便,手法便利,脚法轻固,进退得宜,腿可飞腾。

而其妙也,颠起倒插;而其猛也,披劈横拳;而其快也,活捉朝天;而其柔也,知当斜闪。

故择其拳之善者三十二势,势势相承。遇敌制胜,变化无穷,微妙莫测,窈焉冥焉,人不得而窥者,谓之神。

俗云:“拳打不知”,是迅雷不及掩耳,所谓“不招不架,只是一下,犯了招架,就有十下”。

博记广学,多算而胜。

古今拳家,宋太祖有三十二势长拳,又有六步拳、猴拳、囮拳,名势各有所称,而实大同小异。

至今之温家七十二行拳、三十六合锁、二十四弃探马、八闪番、十二短,此亦善之善者也。

吕红八下虽刚,未及绵张短打,山东李半天之腿,鹰爪王之拿,千跌张之跌,张伯敬之打,少林寺之棍与青田棍法相兼,杨氏枪法与巴子拳棍,皆今之有名者。

虽各有所长,然传有上而无下,有下而无上,就可取胜于人,此不过偏于一隅。

若以各家拳法兼而习之,正如常山蛇阵法,击首则尾应,击尾则首应,击其身而首尾相应,此谓上下周全,无有不胜。

大抵拳、棍、刀.枪、钗、钯、剑、戟、弓矢、钩镰、挨牌之类,莫不先有拳法活动身手。

其拳也,为武艺之源。

今绘之以势,注之以诀,以启后学。

既得艺,必试敌,切不可以胜负为愧为奇,当思何以胜之,何以败之,勉而久试。

怯敌还是艺浅,善战必定艺精。

古云“艺高人胆大”,信不诬矣。

余在舟山公署,得参戎刘草堂打拳,所谓“犯了招架,便是十下”之谓也。

此最妙,即棍中之连打、连戳一法。

Texte original

(Cet art n’est pas du tout prévu pour la guerre4, mais pouvoir avoir davantage de force5 est aussi ce que devraient étudier ceux qui appartiennent au domaine militaire. Si toutefois, nombreux sont ceux qui y sont réfractaires, qu’ils écoutent simplement cela par curiosité 6).

Les méthodes du Poing semblent ne pas être prévues pour les techniques des grandes batailles ; cependant, exercer activement les mains et les pieds et habituer les membres et le corps au travail assidu constituent la porte d’entrée pour commencer à étudier et s’initier à l’art. C’est pourquoi elles sont consignées à la fin pour former une seule famille7.

Pour apprendre le Poing, il est requis des principes corporels de vivacité et d’agilité, des techniques de mains opportunes et précises, des techniques de pieds légères et fermes, avancer et reculer finissant par s’adapter et les jambes étant capables de s’élever dans les airs et de bondir. 

Sa subtilité est dans s’abaisser et s’élever, se déplacer en rond et s’insérer 8 ; sa férocité est dans hacher et fendre, et frapper du poing brusquement ; sa rapidité est dans les captures vives et projections vers le ciel ; sa souplesse est dans la connaissance du moment juste pour esquiver en diagonale.

C’est pourquoi ont été sélectionnées les 32 meilleures positions du Poing. Les positions se complètent les unes aux autres. Face à l’ennemi, on sortira vainqueur avec des changements sans fin, merveilleusement subtils et imprévisibles, si profonds et si obscurs qu’il se demandera ce qu’il se passe ; personne ne peut les percevoir et les nomme divins. 

Le dicton populaire dit : « Le poing a frappé et tu ne le sais pas » ; c’est comme le tonnerre qui éclate sans avoir le temps de se couvrir les oreilles. Ce qui signifie « pas de technique, pas de position, une fois suffit ; tomber dans la technique et les positions, alors il en faudra dix ».

De larges sources et une étude étendue, avec de nombreux préparatifs, amènent à la victoire. 

Parmi les boxes anciennes que l’on trouve aujourd’hui, il y a la Boxe longue en 32 postures de l’Empereur Song Taizu (Taizu Changquan), la Boxe en 6 pas (Liubuquan), la Boxe du Singe (Houquan), la Boxe du leurre (Huaquan). Ces styles fameux ont chacun leur appellation, mais ils ne diffèrent, en réalité que sur des points de détails.

Ont aussi survécu jusqu’à aujourd’hui la Boxe des 72 marches de la famille Wen (Chuojiao), les 36 prises combinées, les 24 éclaireurs à cheval 9, les 8 retournements éclairs (Fanziquan), les 12 raccourcis, et font aussi partie des meilleurs.

Bien que les 8 coups de Lü Hong soient durs, ils ne sont pas aussi bons que les frappes courtes en continu de Zhang. Les jambes de Li Bantian 10 du  Shandong, les saisies des serres de l’aigle de Wang, les culbutes de Zhang aux mille culbutes, les frappes de Zhang Bojing, le bâton du temple de Shaolin équivalent aux méthodes du bâton de Qingtian, les méthodes de lance de la famille Yang avec le bâton de la Boxe Bazi, sont tous devenus célèbres aujourd’hui.     

Bien que chacun ait ses propres avantages, certains transmettent le haut mais pas le bas, d’autres transmettent le bas mais pas le haut ; même s’ils peuvent remporter la victoire sur quelqu’un, ils ne reflètent partiellement qu’un angle 11.

Si l’on prend chaque école pour en étudier simultanément les techniques de combat, c’est exactement comme le déploiement tactique des serpents du mont Chang 12 ; frappez la tête et la queue répond ; frappez la queue et la tête répond ; frappez le corps, et la tête et la queue répondent en retour. C’est dire que si haut et bas sont entièrement complets, on est sans égal 13.

D’une manière générale, poings, bâton, sabre, lance, fourche, râteau, épée, hallebarde, arc et flèches, pique à crochets, les types de boucliers, tous commencent par les méthodes du poing pour exercer le corps et les mains.

Les méthodes du poing constituent la source des compétences martiales.

Maintenant, les positions ont été dessinées et annotées de formules 14, afin d’éclairer les jeunes étudiants.

Une fois les compétences acquises, il faut les tester sur un adversaire, mais en aucun cas il ne faut considérer la victoire comme une fierté ou la défaite comme une honte. On devrait plutôt analyser comment on a gagné et comment on a perdu. Se donner encore du mal un certain temps et tester à nouveau.

Si l’on craint l’ennemi, c’est que les compétences sont encore superficielles. Pour être bon en combat, il faut avoir fixé l’essence de l’art 15.

Les anciens disaient : « Plus l’art est élevé, plus le courage est grand » ; les mots ne mentent pas.

Lorsque je servais au Bureau gouvernemental à Zhoushan, j’ai pu participer aux entraînements militaires de boxe avec Liu Caotang ; cela m’a appris ce que signifiait « Que j’attaque ou défende, je reçois dix coups ».

Mais le plus merveilleux, c’était sa méthode unique de frappes successives et d’enchaînements en estoc avec le bâton 16.

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4 D’autres versions possibles : « Cet art ne prépare pas à la guerre »,  « Ces compétences ne sont pas la priorité des militaires ».

5 Ou encore : « On peut en faire une force » (fournir un avantage).   

6 Autre traduction possible : « Les civils qui ne peuvent être forts devraient également suivre cet enseignement pour en tirer simplement un avantage » (sachant que la plupart des soldats se recrutaient parmi les civils dans les villages).  

7 La famille des arts militaires. Le texte a l’avantage de donner une idée de ce que n’est pas l’art martial et de ce qu’il est censé apporter.

8 On notera ici la mobilité du corps avec ses changements permanents de directions et de hauteurs.

9 Ou encore : « Caresser l’encolure du cheval en 24 mouvements ».

10 « Li qui sépare en deux le ciel ».

11 Ces styles ne sont spécialisés que dans un domaine de compétence particulier.

12 Le Mont Constant. Référence à une formation de bataille des troupes (voir chapitre 11 du Sunzi Bingfa).

13 Un pratiquant qui a étudié profondément plusieurs styles maîtrisera plusieurs compétences. Le combattant doit aussi bien savoir frapper efficacement avec toutes les parties du corps, mais aussi luxer, projeter et utiliser différentes armes. Par ailleurs, harmoniser le haut et le bas permet d’acquérir le corps entier qui permettra d’exprimer la force globale du corps et également de pouvoir exprimer et enchaîner spontanément n’importe quelle technique (pied, poing, saisie, clés, projection).

14 Instructions orales.

15 Qi Jiguang montre que l’art martial n’est pas un art de guerre, mais une recherche de maîtrise du corps avec le développement de plusieurs compétences spécifiques (de renforcement, de puissance, de souplesse, de techniques diverses, de vitesse…). Ainsi, le pratiquant d’arts martiaux ne combat que pour tester la maîtrise de son gongfu afin de voir où il en est dans sa pratique. Mais comme on le voit, l’art martial peut préparer tout homme aux techniques militaires et autres métiers de protection et de formation de corps spéciaux (police, armée, transports de fonds, etc.). La maîtrise peut s’exprimer de différentes manières.  

16 Dans cette conclusion, on peut y comprendre que bien que les mains préparent au maniement des armes, l’habileté aux armes nourrit la dextérité des mains. 

La suite du texte présente les 32 positions sélectionnées par Qi Jiguang. Seule la première partie du texte a été traduite ici. Mais à titre d’exemple, voici la traduction des trois premières positions :

第一式 懒扎.懒扎衣出门架子变下势霎步单鞭对敌若无胆向先空自眼明手便

1ère forme : le paresseux noue son vêtement.

Le paresseux noue son vêtement* fait apparaître la porte** dans la position***. Changer en descendant la posture d’un pas soudain et faire le simple fouet. Répondre à l’ennemi comme si nous n’avions pas l’audace d’avancer le premier. Vide et naturel, les yeux brillants et les mains prêtes. 

* C’est-à-dire prendre une attitude nonchalante.

** Nos ouvertures.

*** Jiazi : position, structure, grands airs, arrogance. J’appâte l’ennemi en exposant ma position.

第二式 金鸡独. 金鸡独立颠起装腿横拳相兼抢背卧牛双倒遭著叫苦连天

2ème forme : le coq d’or se tient sur une patte.

Le coq d’or se tient sur une patte est tomber et se dresser. Je positionne ma jambe et frappe simultanément du poing brutalement*. Le saisir pour le mettre sur mon dos et s’abaisser comme un bœuf, bras et jambes tombent**.  Entrer en contact et crier fort au ciel.

* Heng : brutal, féroce, horizontal.

** Ce qui peut signifier la chute de l’adversaire, ou encore mes bras et jambes qui s’abattent sur l’adversaire renversé.

第三式 . 探马传自太祖诸势可降可变进攻退闪弱生强接短拳之至善

3ème forme : Caresser le cheval.

Caresser le cheval fut transmis par Taizu lui-même. Toutes les postures peuvent se faire basses et varier*. Entrer pour attaquer et reculer pour esquiver, la faiblesse engendre la force**. C’est la meilleure façon pour intercepter  les frappes à courte distance.  

* Le modèle présenté peut être modifié. Toutes les postures décrites sont à prendre individuellement et peuvent s’enchaîner les unes aux autres.

** Il n’y a pas besoin d’être fort physiquement ; rentrer dans l’adversaire ou l’esquiver comme l’éclair rend quelqu’un de faible (physiquement ou du point de vue de la domination de l’autre en combat) en position de force.

Source :

https://ctext.org/wiki.pl?if=gb&chapter=20&remap=gb

https://baike.baidu.com/item/%E6%8B%B3%E7%BB%8F%E6%8D%B7%E8%A6%81%E7%AF%87

(Traduction et commentaires par Gongmen)